PENSÉE PHILOSOPHIQUE | La Sobriété et le Partage |
A l’heure où personne se sait plus très bien qui écouter, qui croire, sur qui compter et quelle sorte de courage il est vital de déployer, il est important de se rappeler une chose essentielle : Nous ne sommes pas nés sans passé, nous sommes ici et maintenant et nous nous dirigeons vers un futur à construire. A nous de savoir vers lequel nous voulons aller ?
Permettez-moi d’emprunter à quelques personnes qui ont nourri ma pensée, quelques réflexions pour étayer mon propos. Sans ordre, ni hiérarchie, ces personnes ont fait grandir la conviction que l’humain lorsqu’il se prend en main en acceptant ses erreurs, ses défaillances et en respectant les valeurs d’humanité qui sont censées nous ressembler, cet humain-là est capable de transcender tous les clivages et surmonter tous les défis.
Alors que disent nos penseurs :
Eugène IONESCO nous invite à un minimum d’esprit critique : « il vaut mieux penser maladroitement, courtement mais penser par soi-même que répéter les slogans qui courent les rues »
Comment alors ne pas faire référence aux effervescences éphémères tant journalistes que réseauteuses. Ce malin virus au sens de malignité j’entends bien sûr ! Que dit-il de nous les humains d’aujourd’hui ?
Il dit une quête éperdue de vérité unique, le désir fou de n’entendre qu’un seul son de cloche. Pour une raison simple : Personne ne veut mourir dans une détresse respiratoire, personne ne veut voir partir son parent dans la solitude ou la souffrance. Il dit aussi un monde où je croîs et crois, beaucoup ont confié plus qu’ils n’auraient dû, à d’autres le sort de leur santé et que nos décideurs sont eux-mêmes face à des considérations qui les dépassent aussi devant des opinions publiques quelques peu tétanisées.
La question du langage est au cœur de cette spirale et, lorsque la communication devenue toxique, modifie notre rapport au bon sens, nous perdons de vue l’essentiel. Prenons quelques exemples :
- Est-ce que je manque de vocabulaire si “foyer infectieux” me parle plus que “cluster” ? Pourquoi ce changement de vocabulaire qui n’apporte rien mais qui met à distance la réalité comme le décrivait Orwell dans 1984 ?
- Est-ce que je contribue à entretenir un climat de suspicion en écrivant ces mots ?
Je ne le crois pas ! J’aime les humains et je suis comme eux à me questionner sur les incohérences sans pour autant avoir envie de mettre le feu.
C’est vrai que résonne dans ma tête les mots d’Hannah Arendt : « Le pire danger pour le soumis est l’homme libre de l’idéologie, ou qui s’en est libéré. Cet homme renvoie au soumis l’image de son infériorité que constitue la perte de son individualité et la limitation de son champ de raisonnement. C’est pour cette raison que tout doit être mis en œuvre pour que l’infidèle, le mécréant, l’apostat disparaisse ».
Si je veux respecter ma liberté de penser, j’ouvre donc un espace de véritable dialogue où l’hyper communication n’a pas sa place.
Je voudrais écouter pour entendre le point de vue de l’autre afin de confronter nos avis et nous enrichir de nos différences, produire de l’intelligence collective mais pas dans l’optique de répondre systématiquement. Le silence fait partie intégrante de cet échange. La réponse à tout, en temps réel n’est pas de mise sans vérification.
On dirait que sans réplique aujourd’hui nous n’existons pas ! L’information est tronquée, voire falsifiée pour satisfaire le sensationnel, pour faire du buzz.
Alors, où sont l’homme et notre monde si civilisé, si technologique, si complexe dans tout cela ?
Sénèque nous donne un chemin à suivre. Chacun y chemine à sa manière : « Les hommes sont nés pour une mutuelle assistance ; la colère est née pour la destruction commune. »
La colère est l’une des émotions primaires les plus difficiles à dompter, alors essayons au moins de nous en souvenir avant de faire l’économie du dialogue et d’aboutir à des maux bien pires qu’aujourd’hui.
| Article rédigé par Cécille BARBE – Responsable du Pôle Ressources Humaines |